Prix public [nuit blanche]

Pleine lune

Je l’observe de mon lit, par la fenêtre ouverte. Je la voyais plus grosse, a-t-elle fondu en perçant la stratosphère
dans sa chute ? Je n’ai hélas plus assez de force à mon âge, pour sortir et décrocher cette lune échouée comme un
ballon dans un arbre. Au début, je ne comprenais pas cette opalescence maculée de taches anthracite. À présent,
je vois une goutte, une larme de géant tombée d’un visage poussiéreux dans la fourche d’une ramure. Le ciel
s’obscurcit, il s’agit peut-être de son ombre. J’entends des pas résonner dans mes veines, la perspective d’une visite
impromptue atténuerait le poids de ma solitude. Je m’endors, sous mes paupières, deux sphères lumineuses
veillent sur moi. Il me semble qu’une caresse balaie mon front, c’est une saute de vent mais je préfère croire qu’il
s’agit du souffle d’une créature bienveillante.